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SOIXANTE HUITIEME JOUR ( 3 )
Il est là ! |
Notre groupe se met en place. Je suis à l'extrême droite. Le FAMAS est lourd à mon cou. Je commence à transpirer à grosses gouttes.
Je charge mon fusil, le doigt prend place le long de détente. Nous avançons prudemment, scrutant le paysage devant moi. Le gilet pare-balles n'est pas des plus confortables, il gêne nos mouvements et empêche une prise de visée correcte.
Des coups de feu éclatent sur la gauche du groupe. Je cherche les impacts pour repérer la cible. Elle est hors de vue. Nous continuons notre progression. D'autres détonations percent mes bouchons anti-bruits. Je ne vois toujours aucun ennemi de papier. Je commence à désespérer.
Je gravis lentement un petit mouvement de terrain. Les yeux au ras de la crête, je la vois enfin, la tête ronde et verte d'une cible. Je tombe à genoux. J'épaule. Trois ou quatre coups. Etant un simple assemblage de bois et de papier, la cible reste sans réaction. J'espère l'avoir touchée. Ici, sur ce champ de tir rustique et des plus simples, impossible d'apprécier la justesse de son tir. On travaille avant tout les réflexes de base du combattant.
Je me relève. Mes yeux et mon arme balayent le terrain de gauche à droite, de droite à gauche. Cette ombre, derrière l'arbre ? Non, juste une souche. Cette branche, derrière le rocher ? Contact ! Je m'agenouille, j'épaule, je vise, je tire, je me relève, je progresse encore.
L'arme est docile entre mes mains. J'entends à peine les détonations derrière mes protections auriculaires. Le recul est absorbé par l'épaisseur de mon gilet pare-balles.
Nous sommes au pied de massif rocheux. Nous avons pris l'ascendant sur l'ennemi. Nous nous mettons en ligne pour l'assaut final. Nous avançons au pas, épaulé, courte rafale pour forcer l'ennemi à baisser la tête, nous abaissons l'arme pour examiner les environs, quelques pas, épaulé, courte rafale. Mon arme claque à vide. Je jette mon chargeur à terre pour mettre en place un magasin plein. Je continue à progresser jusqu'à épuisement de mes munitions.
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SOIXANTE HUITIEME JOUR ( 4 )
Chargeur ! |
Je suis troisième dans la file. Brahim se tourne vers moi. « Tu seras le blessé », me glisse-t-il. Tant pis, j'aurai aimé continuer à rafaler. Nous avançons vers la colline. « Homme à terre ! » crie quelqu'un derrière moi. Je vois les deux soldats qui me précèdent mettre genoux à terre et tirer vers la montagne. Je me retourne. Le blessé est juste derrière moi, quelqu'un est déjà à ses côtés pour le haler. Je me précipite sur sa gauche. Je saisis le blessé par son gilet pare-balles et nous commençons à le tirer vers l'arrière. Je marche à reculons et je manque de trébucher. Je lâche ma prise pour me retourner et courir plus facilement. Le blessé est lourd à mon bras. Mon FAMAS ballotte contre ma jambe. Je cherche le point de repli. Encore 20 mètres. Encore 10 mètres. Mes doigts glissent. Je m'arrête pour affermir ma prise. Nous repartons. Je me jette dans le trou. Je roule sur le côté et braque mon arme vers la colline. Les hommes de tête se replient. Ils sont dans ma ligne de tir. Je retiens mon feu.
L'exercice se termine sans que j'ai pu tirer. Je suis lessivé. Je commence à comprendre la pénibilité physique de la mission de de nos soldats en Afghanistan, crapahutant des journées entières dans la montagne, surchargés de munitions et d'équipement. Et je ne parle pas de l'ennemi.
Nous nous rassemblons pour vider nos chargeurs.
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SOIXANTE HUITIEME JOUR ( 5 )
Purée, qu'il est lourd ! |
Il est 11h30, fin du tir. Nous nous rassemblons près des véhicules pour l'inspection des armes. Les enfants sont partout autour de nous, tendant la main pour leurs sempiternels cadeaux. Ils essayent d'échanger des munitions trouvées sur le sol. Ils reçoivent quelques bouteilles d'eau.
Nous repartons vers Abéché. Je prépare mon appareil photo pour prendre quelques clichés du camion renversé dans le fossé, malheureusement il est déjà dépanné. Le tracteur et la semi-remorque ont déjà été chargés sur des camions, libyens eux aussi.
Arrivés au camp, nous nous précipitons vers l'ordinaire. J'ai l'estomac dans les talons. J'avale goulument les pâtes et le lapin à la moutarde.
Je nettoie mes armes avant de prendre enfin une douche bien méritée. Il est 15h00. Je fais la sieste jusqu'à 18h00. Je peux enfin déguster une bière bien méritée.
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SOIXANTE NEUVIEME JOUR
Exercice incendie |
Pour ma part, je vais courir avec Mathieu, et quelques autres, autour de la piste d'atterrissage de l'aéroport. Je reste dans les temps.
L'après-midi, après la sieste, nous emmenons les cadres de la QRF repérer les lieux sensibles de la ville, au cas où une intervention serait nécessaire. Le lieutenant nous paye un coca à la Rose du Sable. Abéché est assez animée aujourd'hui à cette heure là, peut être la proximité des élections législatives.
Soirée mange-debout, hamburgers au menu. Le pain a déjà durci lorsque nous allons manger. Le steak pourrait être plus cuit.
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SOIXANTE DIXIEME JOUR
Un bon feu de bois |
Après la réunion du vendredi, avec Nico et Jean-Marc, nous allons boire un café à l'infirmerie, gracieusement offert par le médecin-colonel.
Le soir, soirée pizza dans un service. L'ordinaire fournit les ingrédients, pâtons, sauce tomate, fromage, lardons, poivrons, bref tout ce qui va bien, et chacun confectionne lui-même sa pizza, de l'étalement de la pâte à la garniture et jusqu'à la cuisson dans le four à bois qui va bien.
Nous sommes une trentaine. Nico, Jean-Marc et moi sommes les plus anciens en terme de présence sur la base. Les nouveaux sont un peu timides, n'osant pas attaquer la première pizza.
J'ai un peu le vague à l'âme ce soir, jusqu'à ce que je me décide à me mettre derrière le bar et à étaler la pâte pour tout le monde, en contrepartie d'une boisson et d'un huitième de chaque pizza. Cela semble arranger tout le monde, moi également, je me désaltère gratuitement et je mange sans m'embêter à courir après les rares plats à tarte. C'est aussi pour moi l'occasion de briller en société en faisant montre de mes qualités de pizzaiol, reconnues par tous je dois dire. Nico s'essaye à manier le rouleau à pâtisserie, la tentative est loin d'être concluante. Un aviateur le remplace, avec plus de succès. Nous serons les trois seuls à s'y mettre.
Ma place derrière le comptoir m'approche du PC portable qui sert de boîte à musique, je peux choisir une musique qui me convient mieux mais le choix reste limité.
Finalement la soirée est assez sage, noyage des feux à 22h30, comme prévu dans la note de service du COMDET et tout le monde en chambre à 23h00, les bras croisés sur la couverture de laine au cas où il nous viendrait des idées. Tu parles !
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